LE GRAND RETOUR DE LA PLANIFICATION ?
Jacques Sapir, éditions Jean-Cyrille Godefroy, 2022
Un temps, après la chute de l’Union soviétique, la planification n’a plus eu bonne presse. En France, le commissariat général au plan a été supprimé en 2006. Mais les choses changent. On parle désormais de « planification écologique », entre autres formes de planification. Et un haut-commissariat au plan a été recréé en 2020.
Plus que ce « grand retour de la planification », ce qu’étudie Jacques Sapir est l’histoire de cette idée, de ses succès et de ses échecs, à travers trois exemples : ceux de l’Inde, du Japon et de la France. Davantage que l’étude spécifique de tel ou tel plan – Jacques Sapir se livre à de longues études statistiques – ce qui retient l’attention est d’abord l’idée que planification et souveraineté sont intimement liées. Bien souvent, la planification naît de l’économie de guerre, dans des situations où il est important d’affirmer des priorités publiques qui doivent guider l’allocation de moyens financiers et de ressources rares. Jacques Sapir dépasse également certains poncifs : la planification ne se réduit pas à une série de plans immuables gravés dans le marbre. Penser la planification, c’est d’abord organiser un débat stratégique sur les priorités collectives. C’est donc une manière de poser des questions qui ne sont jamais ouvertement débattues lorsque le libre-échange domine ou que la souveraineté a disparu.
C’est peut-être cet aspect de la planification qui est le plus important à nos yeux : non les modalités spécifiques de tel ou tel plan (on se noie vite dans les détails, les textes de loi et les statistiques), mais la possibilité d’une discussion stratégique à l’échelle d’un pays. Dans cette perspective, le fait que tel ou tel plan ait, par le passé, réussi ou échouer, apparaît comme relativement secondaire. Jacques Sapir discute néanmoins ces questions avec force détails, mesurant le succès de tel ou tel plan à l’aide d’indicateurs statistiques, dont la croissance économique. Il n’est pas certain que ce soit là ce qui est toujours le plus approprié : le but de la planification n’est-il pas surtout de mettre en œuvre des fins collectives qui ne sont pas réductibles à la seule croissance du PIB ?

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