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LES NOUVELLES ROUTES DE LA SOIE

Un projet chinois pour le monde

Florent Detroy, Entremises, 2021

En annonçant en 2013 le projet « One Belt, One Road », le gouvernement chinois a pris la tête d’une initiative appelée à remodeler en profondeur l’économie et les rapports géopolitiques pour des décennies. Florent Detroy propose une brève introduction aux enjeux soulevés par ces « nouvelles routes de la soie ». De quoi s’agit-il ? Tout d’abord, de la volonté de développer des circuits d’échanges à partir de la Chine, à travers l’Eurasie et jusqu’en Europe, avec également des débouchés en Afrique (avec Djibouti comme point d’entrée) et des prolongements en Asie du Sud-Est. Ce projet commercial a deux volets, l’un terrestre, l’autre maritime. Le premier a déjà porté quelques fruits puisque, alors que le fret ferroviaire était inexistant entre la Chine et l’Europe il y a dix ans, il existe aujourd’hui 35 villes chinoises connectées par le train à 34 villes européennes. La part du fret ferroviaire est appelée à croître rapidement. Il est certes, à l’heure actuelle, plus onéreux que le fret maritime, mais il est aussi deux fois plus rapide. Dans un monde où les retards d’approvisionnement sont très coûteux, cet avantage n’est peut-être pas négligeable.

Mais les nouvelles routes de la soie ne sauraient se limiter à la circulation des biens. Tout d’abord, pour une raison simple : pour que les biens circulent davantage, il faut des infrastructures. Ainsi, la Chine entend déployer, dans plusieurs dizaines de pays, une vaste politique de financement d’infrastructures (ports, lignes de chemin de fers, etc.). À cette fin, la Chine a mis sur pieds une institution qui se veut concurrente de la Banque mondiale, la Banque asiatique d’investissement pour les infrastructures. En Chine, le développement de ces infrastructures contribue à déplacer le centre de gravité du pays : historiquement situé le long des côtés et à proximité des ports, on le voit se déplacer vers l’ouest du pays, avec de grandes entreprises qui font le pari de s’y installer, comptant précisément sur l’essor de ces nouvelles lignes de communications. Ailleurs en Asie centrale, en Europe et en Afrique, bon nombre de projets ont déjà été financés. Même si ces projets ont avant tout une dimension économique, il n’est guère douteux que le poids de Pékin se fera sentir davantage.

S’il nous faut formuler une réserve, c’est peut-être sur ce dernier point qu’elle doit porter. Le livre de Florent Detroy voit avant tout les nouvelles routes de la soie comme un projet économique. Mais il est bien évident qu’il prend place dans un contexte de bouleversement des équilibres mondiaux, où la Chine tend à s’imposer comme superpuissance face aux États-Unis. Une fois des infrastructures construites et financées, il paraît évident qu’une influence sera exercée sur les pays bénéficiaires. Plus encore, quelle sera la réaction chinoise lorsqu’il faudra sécuriser ces infrastructures ? Les nouvelles routes de la soie posent aussi la question des rapports entre terre et mer au sein du nouvel ordre mondial. La Chine s’affirmera-t-elle comme une puissance avant tout maritime, tournée vers le pacifique ? Ou comme une puissance terrestre, dont le champ d’influence premier serait le vaste continent eurasiatique, et jusqu’à l’Afrique ? Sur toutes ces questions, qui seront centrales pour les décennies à venir, bien d’autres choses devront encore être écrites.

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