Depuis la crise du Covid-19, la relocalisation de la production de biens essentiels – tels que les médicaments – est un thème en vogue. Malheureusement, la relocalisation ne peut pas résulter uniquement de déclarations d’intentions et requiert une réelle stratégie industrielle. Un exemple l’illustre de manière nette : l’échec patent de la relocalisation en France de la production de masques.

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Un bref retour en arrière

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Durant la crise du Covid-19, les masques sont apparus comme un bien essentiel. À l’époque, outre une production par quatre entreprises françaises[1], la très grande majorité des masques consommés étaient importés de Chine. Le président de la République a maintes fois exprimé sa volonté que la France ait une « indépendance pleine et entière » en matière de production de masques. Le 31 mars 2020, il s’est notamment rendu dans l’usine Kolmi-Hopen (Maine-et-Loire) pour réitérer cette volonté.

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Dans un premier temps, les commandes de l’État et des collectivités, ainsi que des aides publiques de Bpifrance, ont permis d’augmenter significativement la production, à la fois chez les acteurs historiques, et chez une vingtaine d’autres acteurs qui se sont reconvertis ou créés pour produire des masques. Superficiellement, donc, les résultats ont été excellents.

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Deux ans plus tard : L'abandon des acteurs relocalisés

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Deux ans plus tard, cette relocalisation n’apparaît malheureusement que comme un « coup » médiatique de plus.

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Dès le pic de la crise passé, la commande publique est très majoritairement retournée vers les fournisseurs chinois. Sur la base de tous les appels d’offre publics depuis juillet 2020, il apparaît que 97,3% des masques achetés par des entités publiques viennent de Chine[2].

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Par conséquent, plusieurs acteurs du secteur sont aujourd’hui en faillite ou au bord de la faillite. Parmi de nombreux autre cas, on peut citer :

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• La Coop des masques (Bretagne) a été placée en liquidation judiciaire le 12 octobre 2022[3].

• Les Ateliers Pulsion Design (Maine-et-Loire), qui avaient été l’une des premières entreprises à répondre à la crise en 2020, étaient au bord de la faillite en février 2022 et contrainte de licencier[4].

• Dans les Côtes d’Armor, l’entreprise Klap a annoncé placer ses salariés en chômage partiel[5].

• D’autres acteurs qui s’étaient reconvertis dans la production de masques sont en train d’abandonner cette activité.

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Tout cela, en moins de deux ans.

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Qu'en conclure ?

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L’échec de la relocalisation de la production de masques permet de tirer au moins deux leçons.

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Premièrement, une visibilité de long-terme sur la commande publique est indispensable. La commande publique ne peut pas uniquement procéder par à-coups, pour soutenir un « coup » médiatique ou une initiative temporaire de courte durée. En d’autres termes, l’État et les collectivités – acheteurs importants de nombreux biens – doivent donner une certaine stabilité aux secteurs jugés stratégiques.

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Deuxièmement, l’absence presque totale de restriction au libre-échange condamne tôt ou tard certaines entreprises relocalisées à céder face à une concurrence parfois déloyale. Une relocalisation durable requiert un protectionnisme bien pensé, au moins pour les biens stratégiques.

 

Notes :

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[1] Ces entreprises sont Kolmi-Hopen, Macopharma, Valmy et Paul Boyé.

[2] Chiffre rapportés dans « La gueule de bois des fabricants de masques français », Les Echos, 4 octobre 2021. Disponible à :  https://www.lesechos.fr/pme-regions/actualite-pme/la-gueule-de-bois-des-fabricants-de-masques-francais-1351784

[3] https://www.letelegramme.fr/economie/pres-de-guingamp-la-coop-des-masques-en-redressement-judiciaire-17-03-2022-12949117.php

[4] https://www.ouest-france.fr/pays-de-la-loire/la-seguiniere-49280/au-bord-de-la-faillite-ateliers-pulsion-design-a-la-seguiniere-perd-ses-dernieres-couturieres-2f97746a-960d-11ec-9502-5ed989acc404

[5] https://www.ouest-france.fr/economie/entreprises/enquete-la-reindustrialisation-de-la-production-francaise-de-masques-tourne-au-fiasco-e45723d2-6033-11ed-81fe-30b170697b40

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